Pense à déclarer le grain
Qu’on pile, casse
Et poudroie
Sur les bords lumineux
Des clos d’Écalgrain.
Pense à te faire vigile,
À venir, de jour
Ou de pluie,
Vérifier que les vagues
Finissent
Par se briser.
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Ce que tu vois
N’est pas – n’est plus
Ce que tu vois.
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Pense à peindre ces chasses
Sous des haies
De ronces
Où se tissent
Des murs de mûres
Et de pierres sèches.
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Mais pense d’abord à danser,
Improvise
Et garde intacte
La chance que tu as
De vaincre
Ton sort.
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La mer est d’ici
C’est entendu.
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Pense à dire la terre
Le silence,
Les chemins
Qui s’enterrent,
Le vent
Qui sèche
Nos pleurs
Et les morts
Qu’on sent,
Qui soufflent
Sous les fleurs,
Invitant
À nous taire,
À nous
Retirer.
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Pense à dénoncer la lumière
Sans limite,
Nos enthousiasmes
Et la beauté
Qui résiste et
Survit
Aux étreintes du ciel.
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Pense à prier pour les poètes
Les passeurs et les prêtres
Car c’est gageure ici de durer.
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N’oublie pas
Que cette terre aussi t’habita
Bien avant que tu ne songes
À y planter
Tes propres racines,
À y inviter tes amis.
Souviens-toi que la peur d’aimer
Fait souvent mal,
Mais que CE en quoi
Tu crois
Est LÀ réuni.
N’oublie PAS.
N’oublie pas
Que ta voix donne sens
Et qu’elle s’installe ICI,
Chaque jour,
Un peu
Plus.
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Pense à déclarer le grain
… à te gorger les yeux
… à peindre ces chasses
… à rappeler l’horizon
… à témoigner des tamarins
… à indiquer ces grèves
… à dénoncer la lumière
… à dire la terre
… à prier pour les poètes
… à croquer les vents
Pense à parler de l’ange
N’oublie pas.